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Vous avez dit "fleur bleue" ?

Parfois, des doutes surgissent sans prévenir, quand on écrit. Parfois, on se pose certaines questions et il peut être difficile de trouver des réponses satisfaisantes.

Nous vivons dans un monde qui va mal. C'est indéniable. Depuis trois ans, il est presque impossible d'ouvrir un journal ou d'allumer la télévision sans être submergé par un flot de mauvaises nouvelles, plus angoissantes les unes que les autres. Épidémies, catastrophes naturelles, guerres. Au cœur de cette avalanche d'événements atroces, n'est-il pas un peu déplacé et futile de choisir d'écrire de la romance ? Les histoires d'amour où tout se termine bien ont-elles réellement leur place dans notre réalité ?

J'avoue que je me suis souvent interrogée à ce sujet, ces dernières années - et qu'il m'arrive de m'interroger encore, de temps à autres...

Récemment, j'ai compris que ces crises de doute allaient bien au-delà de ma décision d'écrire des romans sentimentaux. Au fond n'étais-je pas en train de me questionner au sujet de la place de l'artiste dans la société, du rôle qu'il peut choisir d'endosser ou non ?

Depuis toujours, et encore plus en période de troubles, certains artistes se sont servi de leurs créations pour se faire lanceurs d'alerte, porte-paroles, porte-drapeaux. Certains ont clamé haut et fort leurs convictions, leurs messages, à travers leurs œuvres ; quitte à payer leur engagement au prix fort, parfois. Et en songeant à ces actions militantes, il m'arrive de penser que c'est là le seul chemin que peut prendre un artiste. Se faire témoin de son temps, dénoncer les dysfonctionnements du monde dans lequel il vit, tenter de changer les choses en donnant plus de portée à sa voix.

Mais est-ce réellement l'unique place que l'art peut occuper ? Sa seule finalité ?

Au fond, une part de moi crie un grand "non" retentissant.

Pourquoi ai-je envie d'écrire des romans d'amour ? Pourquoi ne pas plutôt mettre ma plume au service des grandes causes qui me touchent de près ? Pourquoi me contenter de créer de la littérature légère quand je pourrais être plus engagée ?

J'ai fini par trouver une réponse en découvrant les réactions de certains lecteurs et lectrices. J'écris pour celles et ceux qui ont besoin d'insouciance et d'un univers où les pires épreuves finissent toujours par être surmontées. J'écris pour celles et ceux qui ont besoin de croire encore au happy end. J'écris parce que chaque combat a besoin de sa trêve, parce que chaque lutte a besoin d'espoir, parce que chaque mauvaise nouvelle annoncée au journal télévisé a besoin d'être adoucie par un rayon de soleil. J'écris parce que je suis convaincue que les histoires d'amour qui finissent bien sont parfois le réconfort dont nous avons tous besoin lorsque la réalité devient trop lourde à porter. J'écris parce que l'émerveillement, le rêve, la tendresse sont aussi nécessaires à nos cerveaux que l'eau et l'oxygène le sont à nos corps.

Il est arrivé que des lecteurs trouvent mes romances trop fleur bleue, trop naïves ou moins consistantes que d'autres livres qui ont pu atterrir sur leurs étagères. Plusieurs fois, ces critiques m'ont profondément blessée, au point de me pousser à remettre en question mes choix d'écriture. Mais aujourd'hui, à toutes ces personnes, je réponds : je suis fière d'être fleur bleue. Je suis fière d'inventer des personnages qui savent nourrir le cœur comme d'autres nourrissent l'intellect. La romance n'a jamais prétendu changer le monde, et je laisse à d'autres artistes le soin de faire cela car ils sont probablement bien mieux outillés que moi pour y parvenir. Pour ma part, je suis heureuse d'apporter un sourire, une larme, un pincement de cœur, un attendrissement.

Un peu d'amour, tout simplement.

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